20 octobre 2007

LA MISE EN ŒUVRE DE LA LOLF A LA LUMIERE DES TRAVAUX DU COMITE INTERMINISTERIEL D'AUDIT DES PROGRAMMES (CIAP)

Notre débat du 16 Octobre 2007 autour de Pierre LUBECK.


1. UNE BREVE HISTOIRE DE LA LOLF

Une origine transpartisane
La loi organique relative aux lois de finances - la LOLF - réforme en profondeur la gestion de l'État.
La LOLF est le fruit d’une action conjointe de deux parlementaires, l’un de droite Alain Lambert (sénateur et futur ministre délégué au Budget), l’autre de gauche Didier Migaud (député PS). Cette loi a fait l’objet d’un consensus lors de son adoption le 1er août 2001, pour devenir applicable à toute l’administration en 2006.

La Lolf, une révolution de velours
Elle permet de passer d’une gestion de structure à une gestion par mission. Elle permet de passer d’une logique de moyens à une logique de résultats.
Avant : Logique de Structure --> ministères titres et chapitres. La dérive naturelle est de vouloir toujours plus pour justifier les structures et une certaine opacité à l’affectation des moyens.
Désormais : La LOLF par mission ministérielle ou interministérielle. Exemple : recherche aide au développement.

La LOLF est organisée en 34 missions dont 12 interministérielles.
Chaque mission est organisée en programmes : de 2 a 10 programmes par mission.
A chaque programme, il y a un responsable de programme et un ministère en charge du programme.
Le programme est l'unité de gestion publique
Chaque programme fait l’objet d’un rapport annuel de performance.
Chaque programme est défini au préalable sur la base d’une présentation stratégique déclinée en actions. Il analyse les coûts, les leviers d'action, définit des indicateurs, des priorités, des objectifs, des cibles.

Des principes clés novateurs
« Justification au premier euro »

Avant, les budgets étaient négociés en fonction des mesures nouvelles, ce qui induisait des augmentations en continue.
Désormais le principe clé de la LOFL est de justifier chaque euro de chaque dépense. Chaque année, l’intégralité du budget peut être remis à plat.

Séparation de l’action du pilotage
Avant, il était difficile de faire la distinction entre les dépenses réellement engagée dans l’action et les coûts de gestion de l’administration.
Désormais, les dépenses nécessaires à l’action sont séparées des dépenses de pilotage et de soutien (frais généraux et logistiques des ministères).

Analyse des coûts complets
Pour chaque programme, les frais répartis dans différentes instances gouvernementales sont regroupées en une seule présentation pour apprécier le coût complet de la dépense publique en regard d’une action et d’un objectif.

Fongibilité asymétrique
Ce terme barbare signifie que les structures de dépenses d’un programme ne sont pas figées dans leur affectation. L’enveloppe budgétaire est globalisée.


2. L’AUDIT DES PROGRAMMES : Missions et fonctionnement

Organisation et missions
Le contrôle de l’application de la LOLF est subordonné à une structure d’Audit interne : Le Comité Interministériel d’Audit des Programmes (CIAP).
Le CIAP a mis au point un référentiel d'audit.
Le CIAP effectue des audits sur site au niveau de la performance
publique des programmes.

Fonctionnement des audits
Les équipes d’audit développent sur place un questionnement avec les interlocuteurs de leur choix.
La commission du CIAP comprend 15 membres. Le rapporteur d’une mission d’audit n’appartient pas au ministère concerné par la mission d’Audit. Il propose à la commission un projet d'avis.


3. PREMIERS ENSEIGNEMENTS

Bilan de la première année
Les premiers constats sur 2006 témoignent des débuts des la démarche et constatent autant de difficultés de gestion que d’ajustement de l’application du principe même de la LOLF. L’année 2007 devrait être plus satisfaisante… et plus encore l’année 2008, dont l’élaboration de la Loi de Finance aura pu tenir compte des enseignements de la première année.

Des programmes trop foisonnants : les ministères divisent les programmes en trop d’actions pour mieux régner, pour gardent la main !
Il est nécessaire de « dégonfler » les programmes de soutien
Il faut davantage pousser à la prise de responsabilité
Le dialogue est encore insuffisamment axé sur la performance

Il y a trop d’indicateurs : 1600 indicateurs dans le budget de l'Etat.
Trois catégories d’indicateurs sont essentiels :
1. l’impact sur les populations
2. la qualité du service
3. le coût de l'action : efficience

Il y a beaucoup d’indicateurs non pertinents. Exemple : les indicateurs d’activité. Ce n’est pas parce qu’une entité est saturée en termes de fréquentation que ce qu’elle fait est à l’optimum de l’utilité publique.
Il est important dès la conception du programme de définir le dispositif de pilotage
Il convient aussi de mieux suivre la multiplication des budgets opérationnels
Les déterminants essentiels resteront toujours l’audit des résultats.

Conclusion
Le CIAP est une très belle réussite interministérielle, 200 inspecteurs des finances y participent.
Il y a des chantiers d’amélioration en termes de coordination des audits.
L’enjeu premier est que l’Etat puisse en toute connaissance de cause s’engager sur des politiques soutenables faisant passer l’obligatoire avant l’accessoire.

Pierre LUBECK,
(ENA 1970) est Inspecteur Général des Finances, Président du CIAP (Comité Interministériel d'Audit des Programmes) et Ancien Directeur Gestion et Finances de la SNCF.